Couvrant plus de 70% de la planète, les océans, véritables poumons et source de vie de notre planète, sont l’un des principaux réservoirs de biodiversité dans le monde. Pourtant, les rapports scientifiques nous rappellent continuellement que l’état de santé de nos océans se dégrade et que leur fragile équilibre est menacé. Dans cette optique, les aires marines protégées sont au cœur des efforts de conservation des écosystèmes marins.

Cet article présente les aires marines protégées en s’attardant particulièrement à l’une de leurs déclinaisons: les zones de protection marines (ZPM) constituées en vertu de la Loi sur les océans. Notons qu’ à l’extérieur des aires protégées, d’autres lois et règlements s’appliquent pour la protection de l’eau et des espèces vivantes.

Qu’est-ce qu’une aire marine protégée ?

Une aire marine protégée est une partie de l’océan qui bénéficie d’une protection légale visant à assurer la conservation à long terme de la nature. De manière générale, au Canada, une «aire protégée» est définie juridiquement selon les termes de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), à savoir un espace géographiquement délimité, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d’assurer à long terme la conservation de la nature, avec les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés

Les aires marines protégées au Canada comprennent : 

  • les zones de protection marines constituées en vertu de la Loi sur les océans,
  • les aires marines nationales de conservation, 
  • les portions marines des réserves nationales de faune, 
  • les refuges d’oiseaux migrateurs, 
  • les parcs nationaux et les zones protégées par des lois provinciales (telle la Loi sur la conservation du patrimoine naturel au Québec). 

Notons que la navigation, la pêche, la pollution marine ainsi que la gestion des eaux situées en dehors des frontières provinciales sont toutes des éléments de compétence fédérale. Les outils de protection de l’océan relèvent donc majoritairement du gouvernement fédéral. Ils sont principalement appliqués par le ministère Pêches et Océans Canada, par Parcs Canada, et par le ministère Environnement et Changement climatique Canada. Les pouvoirs de surveillance et de contrôle de ces instances leur sont accordés par les dispositions de diverses lois encadrant la protection des aires marines protégées. 

Avantages d’une aire protégée

Une aire protégée gérée efficacement offre de nombreux avantages écologiques, culturels, économiques et sociaux. Sur le plan écologique, une aire protégée peut contribuer à la résilience des écosystèmes face aux diverses pressions des activités humaines et à la réduction des effets des changements climatiques.  Une aire protégée peut aussi participer à la préservation de sites culturels uniques et à la protection des ressources naturelles qui s’y trouvent, d’autant plus si elle est désignée en collaboration avec les communautés. C’est le cas, par exemple, de la réserve de parc national Gwaii Haanas qui vise à protéger des écosystèmes marins mais aussi des sites culturels d’importance pour la Première Nation Haïda. De plus, l’établissement d’une aire protégée peut contribuer à sensibiliser la population aux enjeux environnementaux et permet de renforcer les relations entre humain et nature tout en favorisant la jouissance d’un environnement sain. 

Loupe sur l’une des formes d’aires protégées: les zones de protection marine (ZPM)

Les ZPM sont établies en vertu de la Loi sur les océans. Elles sont constituées d’espaces maritimes qui font partie des eaux intérieures, de la mer territoriale ou de la zone économique exclusive du Canada. Les objectifs justifiant la création d’une ZPM sont énumérés dans la loi et sont multiples, notamment la conservation de mammifères marins, d’espèces menacées, d’habitats uniques, d’espaces riches en biodiversité ou plus généralement de l’intégrité écologique. Le concept d’intégrité écologique est défini dans la loi comme un état où, entre autres, les écosystèmes évoluent naturellement et où la capacité d’autoregénération des écosystèmes et leur biodiversité sont maintenues.

La désignation d’une ZPM permet l’application de mesures de conservation qui s’ajoutent à celles de la Loi sur les pêches qui, pour sa part, s’applique aussi aux poissons et leurs habitats à l’extérieur des aires protégées. Le Canada compte un peu plus d’une douzaine de ZPM qui représentent environ 6% des zones marines et côtières canadiennes.  Gérées par le ministère Pêches et Océans Canada, les ZPM impliquent l’interdiction de certaines activités présentes et futures selon leurs impacts sur les caractéristiques écologiques protégées

Désignation d’une ZPM

Le concept de partenariat s’impose comme un élément essentiel dans la création et la gestion  des ZPM. En effet, son succès dépend d’un idéal de coopération entre de multiples intervenants possédant des intérêts diversifiés, bien que Pêches et Océans Canada assure un rôle de leadership et de coordination du système national d’aire marine protégée au nom du gouvernement du Canada. 

La désignation d’une ZPM est faite par un règlement du gouvernement du Canada sur recommandation du ministre des Pêches et des Océans. Elle peut toutefois être précédée d’une protection temporaire par le ministre.  

D’abord, lorsque les données scientifiques ou les préoccupations locales démontrent la nécessité de protéger une zone particulière, le ministre peut désigner des zones de protection marines par arrêté ministériel pour une protection temporaire. Le ministre doit alors publier un rapport décrivant cette zone et présentant les consultations qu’il a mené avant sa décision. Un arrêté ministériel établit une ZPM pour une durée maximale de cinq ans, permettant ainsi d’y suspendre certaines activités humaines avant que soit officialisée la protection par un règlement du gouvernement.. Le ministre peut autoriser et interdire toute activité qui est susceptible de perturber, endommager ou détruire un organisme marin ou une caractéristique unique de ce milieu de vie. Maximum cinq ans après l’arrêté ministériel, le ministre doit soit mettre fin à la protection ou recommander au gouvernement d’adopter un règlement pour établir une protection à long terme.

Le gouvernement, pour sa part, peut adopter un règlement établissant une zone de protection marine permanente lorsque le ministre de l’Environnement lui fait une recommandation à cet effet. De plus, en situation d’urgence, soit lorsqu’une ressource ou un habitat marin est menacé ou risque de l’être, le gouvernement peut adopter un décret désignant une ZPM temporaire pour maximum 90 jours

Dans tous les cas, le ministre des Pêches et des Océans joue un rôle crucial puisqu’il est responsable de suivre la situation et de faire des recommandations au gouvernement.

Une « Norme de protection des aires marines protégées» pour guider le gouvernement

La création d’aires marines protégées emporte la limitation  de  certaines activités ayant des répercussions sur les écosystèmes. Pour guider le ministre et le gouvernement dans l’exercice de leurs pouvoirs, mais aussi pour offrir davantage de cohérence et de clarté pour les différents acteurs concernés, la Norme de protection des aires marines protégées  a été adoptée en 2019, puis actualisée en 2023 sur recommandation du Comité de conseil national sur les normes concernant les aires marines protégées. Elle n’a pas force de loi mais reflète l’intention du gouvernement.  

La Norme de protection des aires marines protégées vise différentes catégories d’aires protégées dont les ZPM désignées par règlement du gouvernement en vertu de la Loi sur les océans. Notons qu’elle ne vise pas les ZPM établies temporairement par un arrêté ministériel ou un décret d’urgence.

La Norme de protection des aires marines protégées de 2023 prévoit principalement l’interdiction des activités suivantes dans toutes les nouvelles aires marines protégées : l’exploration et l’exploitation pétrolières, gazières et minières, les déversements ainsi que le chalutage de fond. On identifie aussi des exceptions aux interdictions. Par exemple, les interdictions ne s’appliqueraient pas aux activités menées pour des raisons de sécurité nationale ou pour l’exercice de droits ancestraux et issus de traités.

Quelques exemples d’aires marines protégées au Québec

Au Québec, les projets d’aires marines protégées sont sélectionnés, planifiés et réalisés conjointement entre les gouvernements du Canada et du Québec. Les aires marines protégées sont compilées dans le « Registre des aires protégées au Québec » et comprennent notamment:

  • le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent; 
  • la réserve marine de l’Estuaire-de-la-Rivière-Bonaventure; 
  • la réserve aquatique projetée de Manicouagan;
  • l’aire marine protégée du Banc-des-Américains. 

Le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent est un exemple représentatif de l’environnement géographique et océanographique exceptionnel se retrouvant à la confluence du fjord du Saguenay et du fleuve Saint-Laurent. Mais plus encore, il s’agit du premier parc au Québec à avoir été créé pour protéger exclusivement un milieu marin. Couvrant une superficie protégée de 1 245 km2 de territoire marin, cette zone abrite des écosystèmes extraordinaires et les activités permises dans le parc  étant encadrées, la biodiversité y est protégée du fond marin jusqu’à la surface de l’eau.


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