Le 11 juin 2009, l’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection. Aujourd’hui renommée Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et favorisant une meilleure gouvernance de l’eau et des milieux associés (ci-après, Loi sur l’eau). Cette loi a pour objet la protection et la préservation de l’eau en tant que ressource collective de la nation québécoise. Elle précise les responsabilités qui incombent à l’État à titre de gardien de cette ressource et édicte les droits et devoirs de la collectivité à son égard.

 

Qu’implique le caractère collectif de l’eau?

La Loi sur l’eau affirme le caractère collectif de l’eau et l’appartenance de celle-ci au patrimoine commun de la nation québécoise. Cela signifie qu’il est impossible de s’approprier l’eau, sauf exception. En d’autres mots, elle constitue une ressource collective des Québécois·es.

La Loi prévoit aussi le droit pour les individus d’avoir accès à une eau saine pour satisfaire leurs besoins essentiels. Chaque résident d’un territoire donné a droit de faire usage de l’eau. De plus, l’eau doit être disponible en quantité et en qualité suffisantes et être accessible..

La Loi sur l’eau démontre une préoccupation d’intérêt général quant au développement durable de la ressource et à l’accès aux cours d’eau, notamment concernant le fleuve Saint-Laurent. Ainsi, le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs peut prendre des mesures pour la protection, la restauration, la mise en valeur et la gestion de la ressource en eau.

4 grands principes de la Loi sur l’eau

La Loi sur l’eau renvoie à quatre grands principes guidant l’utilisation et la protection de la ressource en eau. 

1 – Utilisateur-payeur

Le principe d’utilisateur-payeur implique que les coûts liés à l’utilisation de l’eau doivent être assumés par les utilisateurs de cette eau, et non par la population québécoise. Dans le calcul de ces coûts, il faut également tenir compte des conséquences environnementales, sociales et économiques de l’utilisation d’eau. 

2- Prévention

Le principe de prévention se traduit en deux obligations:

  • Toute personne a l’obligation de prévenir le dommage, c’est-à-dire d’empêcher celui-ci de se produire, lorsqu’il y a un risque connu.
  • Lorsque qu’il n’y a pas de risque connu, toute personne doit tenter du mieux qu’elle peut de limiter les dommages aux ressources en eau, tel que le ferait une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances.

Ce principe a pris forme à l’adoption de la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques qui reconnaît notamment les fonctions écologiques des milieux humides et hydriques. Cette loi met également en place un programme favorisant la restauration et la création de milieux humides et hydriques. La Loi prévoit également que le ministre de l’Environnement doit prendre les mesures nécessaires pour qu’il n’y ait pas de perte nette de ces milieux et prévoit qu’il doit rendre des comptes à la population à cet égard

3 – Réparation

La Loi sur l’eau oblige toute personne qui cause des dommages à la ressource en eau à réparer ces dommages

Recours possibles au procureur général du Québec

En cas de dommages causés à la ressource en eau, le procureur général du Québec peut prendre un recours. À la suite d’un fait ou d’un acte illégal causant des dommages à la ressource en eau, le procureur général peut intenter une action contre l’auteur des dommages, au nom de la collectivité. À noter que ce recours demeure discrétionnaire : le procureur général n’a aucune obligation de poursuivre. 

Il s’agit d’un régime de responsabilité sans faute, au même titre que les troubles de voisinage. Il n’est donc pas nécessaire de démontrer que la personne qui a causé un dommage a commis une faute. Cela veut dire que même si une personne respecte les lois et les règlements et ne commet pas de faute, sa responsabilité pourra être retenue lorsque des dommages causés aux ressources en eau sont prouvés.

Les 3  sanctions possibles découlant du recours sont:

  • la remise à l’état initial de la ressource, 
  • la réparation par des mesures compensatoires,
  • la réparation par le versement d’une indemnité.

Ces actions peuvent être combinées.

4- Transparence et participation

La Loi sur l’eau promeut également la transparence via l’accès à l’information. En effet, en principe toute personne a droit d’accéder aux informations détenues par les autorités publiques concernant la gestion de la ressource en eau. En pratique, l’accès à l’information est complexe, voire impossible car de nombreuses exceptions limitent l’accès à ces informations.

Création du Bureau des Connaissances sur l’eau

La loi instaure le Bureau des connaissances sur l’eau qui a pour mission d’assurer la mise en place et la coordination technique d’un système d’information visant la collecte de données sur les ressources en eau, de même que la conservation et la diffusion de ces données.  Dans les faits, plusieurs informations sur l’eau sont accessibles depuis le Répertoire d’information sur l’eau.

Quel rôle pour le public?

Le public a aussi son rôle à jouer dans les processus décisionnels grâce à certains mécanismes de participation publique. En principe, la participation publique est surtout privilégiée dans le modèle de gestion intégrée et concertée de l’eau par bassins versants, une approche holistique pour la protection de l’environnement, c’est-à-dire qui prend en compte l’ensemble des points de vue des parties prenantes concernées à l’échelle d’un bassin versant.

Au sens de la loi, un bassin versant est «un territoire géographique qui est drainé vers un même cours d’eau ou un même lac». Ainsi, tous les acteurs d’un même bassin versant sont appelés à participer à la résolution de problèmes touchant l’eau, dans une gestion complète et coordonnée de la ressource.

La gouvernance de l’eau implique donc la participation des acteurs de la société civile dans le processus décisionnel, dans le but d’accroître la légitimité et l’acceptabilité des décisions.


Attention:  Cet article présente le droit en vigueur au Québec et est fourni à titre informatif uniquement. Il ne constitue pas un avis juridique et ne devrait pas être interprété comme tel. Pour obtenir des conseils juridiques, vous pouvez consulter un·e avocat·e ou un·e notaire. Pour obtenir de l’information juridique, vous pouvez contacter les juristes du CQDE.  

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