Saviez-vous qu’au Québec, on estime qu’entre 40 et 80 % des milieux humides en zone agricole et en zone urbaine ont disparu depuis le début de la colonisation ? Cette situation n’est pas unique au Québec : la perte des milieux humides est en fait un problème d’envergure mondiale.

Les milieux humides sont reconnus pour leurs multiples services écologiques. Ils jouent un rôle important notamment dans la purification de l’eau, la protection contre les inondations et le captage de carbone, en plus d’héberger et de nourrir une multitude d’espèces fauniques et floristiques. Quant aux milieux hydriques, inutile de rappeler que l’eau est une ressource essentielle à la vie! Il est donc primordial de protéger ces milieux.

Qu’est-ce qu’un milieu humide ou hydrique?

Un milieu humide peut prendre plusieurs formes. Ça peut par exemple être un étang, un marais, un marécage ou une tourbière. On reconnaît les milieux humides par ces deux caractéristiques :

  • les sols imbibés d’eau, appelés hydromorphes, 
  • les plantes qui se trouvent dans un milieu humide nécessitent une quantité importante en eau. On qualifie ces plantes d’hydrophiles.

Et les milieux hydriques ? Il s’agit par exemple d’un lac, d’une rivière, d’un cours d’eau. On inclut également dans la définition des milieux hydriques la rive et la plaine inondable qui les entourent. 

Et si le milieu humide ou hydrique a été créé par une intervention humaine?La loi ne fait pas de différence entre les milieux humides et hydriques d’origine naturelle et ceux d’origine anthropique, c’est-à-dire créés par une intervention humaine. Que ce soit un milieu humide formé suite à des travaux de drainage ou encore un lac artificiel, ces milieux remplissent des fonctions écologiques importantes et doivent être protégés.

Pourquoi est-ce important de protéger les milieux humides et hydriques? 

Pendant des siècles, les humains ont détruit les milieux humides et hydriques, notamment en les remplissant, en les drainant, ou en y mettant des digues, jugeant qu’ils étaient inutiles ou nuisibles au développement agricole et résidentiel. Ce n’est que récemment que l’importance de ces milieux a commencé à être considérée, soit lorsque l’on a découvert l’ampleur des services écologiques qu’ils rendent aux êtres humains et aux écosystèmes.

En effet, saviez-vous que les milieux humides sont considérés comme les reins de la Terre ? En absorbant les polluants, les milieux humides filtrent naturellement l’eau, augmentant ainsi sa qualité. De plus, ils agissent comme une éponge en retenant les surplus d’eau provenant entre autres de la crue des eaux ou des précipitations, réduisant par le fait même les risques d’inondation, de sécheresse et d’érosion des berges. Finalement, ils constituent un habitat pour de nombreuses espèces et ils atténuent les changements climatiques en séquestrant le carbone.

Avec l’accélération des changements climatiques, la multiplication des canicules et l’augmentation de la fréquence des inondations, il est impératif de préserver les milieux humides.

Comment les milieux humides et hydriques sont-ils protégés par la loi au Québec?

Régime d’autorisation ministérielle

La loi n’interdit pas catégoriquement qu’un projet ou que des travaux aient des impacts sur un milieu humide ou hydrique. La Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) encadre plutôt les activités en fonction de leurs impacts sur l’environnement. Pour en apprendre davantage sur cet encadrement, vous pouvez consulter cet article Obiterre.

Dans la majorité des cas, un projet qui impacte un milieu humide ou hydrique doit  obtenir une autorisation du ministère de l’Environnement.  En effet, la loi prévoit qu’il est nécessaire que les travaux, les constructions ou tout autre intervention dans les milieux humides et hydriques, obtiennent une autorisation ministérielle, sauf exceptions. 

Lorsque l’activité présente un risque faible pour l’environnement, une déclaration de conformité peut être suffisante. Le ministère n’a pas alors à approuver le projet. En milieu humide et hydrique, c’est par exemple le cas de la construction d’un chemin temporaire, de travaux de forage et de la construction d’ouvrages temporaires nécessitant des remblais et des déblais. Cette page du site web du ministère de l’Environnement réfère à d’autres exemples.

Dans d’autres cas, où les risques sont considérés «négligeables», l’activité peut être totalement exemptée.

Le principe d’aucune perte nette

Depuis la réforme juridique de 2017, le principe d’« aucune perte nette » a été incorporé à la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et favorisant une meilleure gouvernance de l’eau et des milieux associés (Loi sur l’eau). Cet article Obiterre aborde les grands principes de cette loi.

L’objectif d’aucune perte nette est d’éviter la perte de milieux humides et hydriques en visant équilibrer les pertes et les gains en superficies, en fonctions écologiques et en biodiversité, sur un territoire donné. Ainsi, les pertes inévitables devraient être compensées pour qu’au final, il n’y ait aucune perte «nette». 

Pour ce faire, on applique la formule « éviter – minimiser – compenser », c’est-à-dire qu’on favorise d’abord les projets qui évitent les milieux humides et hydriques. Lorsqu’il est impossible de les éviter,  on tente de minimiser les impacts sur ceux-ci. Finalement, s’il est impossible d’éviter ou de minimiser les impacts sur ces milieux, une compensation, généralement monétaire, est versée à un fonds qui sert à financer des programmes de création et de restauration des milieux humides et hydriques. La compensation, dont les montants sont prévus dans le Règlement sur la compensation pour l’atteinte aux milieux humides et hydriques, doit toutefois être la solution de dernier recours, puisqu’il est difficile de réellement remplacer les fonctions d’un milieu d’origine.

Le régime transitoire de gestion des zones inondables, des rives et du littoral

À la suite des inondations printanières survenues au Québec en 2017 et 2019, le gouvernement québécois a initié une réforme du cadre juridique régissant les milieux humides et hydriques. Ce régime vise principalement à protéger la population des risques d’inondation, mais contribue incidemment à protéger les milieux humides et hydriques. 

Le régime transitoire, qui est en vigueur depuis mars 2022, établit des règles pour toutes interventions en littoral, en rive ou en zone inondable de faible et de grand courant. Cette fiche est utile pour identifier et délimiter les différents types de milieux visés.

Le Règlement sur les activités dans des milieux humides, hydriques et sensibles (RAMHHS) met en place un régime d’autorisation municipale pour les activités pouvant mettre à risque ces milieux, telles le retrait de végétaux, les constructions résidentielles et des activités agricoles. L’autorisation requise et les conditions qui l’accompagnent dépendent des risques que présente l’activité sur l’environnement, les personnes et les biens, ainsi que du milieu dans lequel l’activité doit être réalisée. 

Le nouveau régime prévoit des interdictions pour certains types de travaux. Il est notamment interdit de construire un nouveau bâtiment résidentiel principal en rive ou en zone inondable de grand courant. De plus, tous les travaux relatifs à un bâtiment résidentiel ou un ouvrage accessoire sont interdits en littoral, sauf ceux de démolition. Cet aide-mémoire répertorie les travaux relatifs aux bâtiements réalisables selon le milieu ainsi que les conditions qui y sont associées.

Des normes particulières sont également prévues pour d’autres types de travaux.

Les plans régionaux des milieux humides et hydriques (PRMHH)

De plus, la Loi sur l’eau impose désormais aux municipalités régionales de comté (MRC) de mettre en œuvre un plan régional des milieux humides et hydriques (PRMHH), abordé en détail dans cet article, afin de favoriser la conservation de ces milieux. Le PRMHH identifie les milieux humides ou hydriques prioritaires du territoire et la manière dont ils seront protégés. Les municipalités locales doivent se conformer au PRMHH de leur MRC en adaptant leur réglementation en conséquence.

Vous voulez savoir comment vous pouvez protéger ces milieux essentiels? Cet article Obiterre est pour vous!


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