La Première Nation Mitchikanibikok Inik affirme que la Loi sur les mines du Québec est inconstitutionnelle

Montréal/ Territoires traditionnels des peuples Kaniwn’kehá:ka et Haudenosaunee, le 15 février 2024 — La Première Nation Mitchikanibikok Inik est devant les tribunaux contre le gouvernement du Québec pour son défaut systémique de les consulter et les accommoder, ainsi que d’autres communautés autochtones, avant d’accorder des claims miniers et de permettre des activités d’exploration sur leurs territoires.

Les Mitchikanibikok Inik (aussi appelés les Algonquins du Lac Barrière) seront à la Cour supérieure du Québec les 19, 20 et 21 février, représentés par les avocat-es du Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) et Ecojustice. La Première Nation conteste la constitutionnalité de certaines parties de la Loi sur les mines du Québec.

La Loi sur les mines du Québec permet à n’importe qui d’obtenir une « entrée libre » (“free entry”) et d’explorer un territoire, y compris sur les territoires autochtones. Ce cadre juridique permet aux claims miniers d’être enregistrés sur les territoires des communautés autochtones sans les consulter en amont et les accommoder, ou même les informer. Les titulaires de claims ont aussi automatiquement le droit d’entreprendre plusieurs activités d’exploration, là encore sans consultation ou accommodation.

En vertu de la Constitution du Canada, le gouvernement a l’obligation légale de consulter et d’accommoder les peuples autochtones avant d’autoriser les activités minières sur leurs territoires qui pourraient affecter leurs droits et titre autochtones ancestraux revendiqués. De par sa conception, le régime d’entrée libre du Québec ne permet pas de consultation avant l’enregistrement de claims miniers ou l’autorisation des activités d’exploration qui ont un impact. Selon la Première Nation Mitchikanibikok Inik, c’est inconstitutionnel.

Ce dossier suit ceux d’autres communautés autochtones ayant contesté avec succès les régimes miniers d’entrée libre d’autres provinces: l’affaire du Conseil des Dénés de la rivière de Ross au Yukon et l’affaire des Premières Nations de Gitxaala et d’Ehattesaht en Colombie Britannique. Les résultats sont clairs : les régimes miniers de libre accès obsolètes et inconstitutionnels ne peuvent pas perdurer.

Marc Bishai, avocat au CQDE, affirme:

« Comment se fait-il qu’après quelques clics et le paiement d’une somme dérisoire, n’importe qui puisse aller faire de l’exploration minière, sans consultation préalable, sur une terre ancestrale qui abrite une communauté autochtone depuis des temps immémoriaux ? Nous espérons que les tribunaux québécois suivront les précédents des autres tribunaux canadiens en déclarant que cela ne peut plus être toléré. »

Danielle Gallant, avocate, Ecojustice dit:

« Pendant trop longtemps, les droits et la souveraineté des peuples autochtones ont été bafoués au nom de l’extraction des ressources. Le libre accès minier est une politique coloniale obsolète qui ignore illégalement l’obligation constitutionnelle de consulter et d’accommoder les communautés autochtones avant que les claims miniers ne soient enregistrés et que les activités d’exploration ne soient autorisées sur leurs territoires. »

« Le Québec a récemment modifié la Loi sur les mines dans le but de faciliter la consultation des peuples autochtones sur certaines activités d’exploration. Cette modification signale que le Québec est conscient de la défaillance de son cadre juridique actuel, pourtant, cet amendement n’est toujours pas à la hauteur. Nous espérons que cette cause importante contribuera à corriger ce tort systémique.»

Le libre accès minier annulé ailleurs au Canada

Le paysage juridique du libre accès minier au Canada a changé durant les dernières années, divers tribunaux ayant reconnu les droits des peuples autochtones à être consultés sur les activités minières sur leurs territoires.

En 2012, la Cour d’appel du Yukon a conclu que le régime d’entrée libre de la province n’était pas conforme à l’obligation constitutionnelle de la Couronne de consulter et d’accommoder les communautés autochtones sur les décisions qui pourraient les impacter. 

En 2023, la Cour suprême de la Colombie Britannique a décidé que les communautés autochtones doivent être consultées avant que tout claim minier ne soit enregistré ou que toute exploration ne soit conduite sur leurs territoires.

Les Chefs de l’Ontario ont récemment demandé une pause d’un an sur les claims miniers en ligne, affirmant que le système minier dans cette province porte atteinte à leur droit à une consultation et une accommodation appropriées. 

À propos

Le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), seul organisme de bienfaisance dédié au droit de l’environnement au Québec, offre une expertise juridique indépendante ainsi que des outils éducatifs à la population, contribue au développement d’une législation et jurisprudence forte et cohérente et utilise le droit pour protéger l’environnement et faciliter l’accès à la justice. 

Ecojustice utilise le pouvoir de la loi pour défendre la nature, combattre le réchauffement climatique, et lutter pour un environnement sain. Ses poursuites stratégiques d’intérêts et publique et ses activités de défense mènent à des décisions judiciaires, à des lois et à des politiques qui créent un précédent et qui apportent des solutions durables aux problèmes environnementaux les plus urgents du Canada. En tant que plus grand organisme de bienfaisance en droit de l’environnement au Canada, Ecojustice possède des bureaux à Vancouver, Calgary, Toronto, Ottawa, et Halifax.

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