Montréal, 2 octobre 2024 – Le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) publie aujourd’hui son rapport intitulé Écoblanchiment dans le secteur financier : L’heure est à la transparence et à la responsabilité. Ce rapport inédit met en lumière les risques croissants liés à l’écoblanchiment dans le secteur financier au Québec et au Canada et formule 26 recommandations concrètes destinées à améliorer la transparence et la responsabilité environnementale des institutions financières et des gouvernements.

Au cours des dernières années, le secteur de la finance durable et de l’investissement socialement responsable (FDISR) a connu une croissance exponentielle, poussée par une demande accrue des investisseurs de s’engager en faveur d’un avenir durable, et par de nouvelles exigences réglementaires dans le même sens. 

L’ampleur du phénomène de l’écoblanchiment financier

Cette multiplication des produits financiers « verts », « durables » et « responsables », tels que les fonds d’investissement ESG,  s’accompagne d’une prolifération d’allégations environnementales fausses, trompeuses ou sans preuves suffisantes, c’est-à-dire de l’écoblanchiment. De la même manière, plusieurs entités actives dans le secteur financier, comme les banques et les sociétés cotées en bourse, ont commencé à vanter leur bonne performance environnementale, sans toutefois s’assurer d’un alignement entre leurs paroles et l’impact de leurs activités. Par exemple : 

  •  une étude a révélé que seuls 5 % des 250 plus grands fonds d’investissement présentés comme socialement responsables sont en réalité alignés avec les objectifs de l’Accord de Paris. 
  • De même, plus de 40 % des informations sur les risques climatiques des sociétés cotées en bourse au Canada ont été évaluées comme « génériques, vagues ou incomplètes » en 2021.

« Le secteur de la finance a un rôle essentiel à jouer dans la lutte contre les changements climatiques. Nous espérons que ce rapport de recherche permettra de guider les acteurs concernés par la finance durable pour faire partie de la solution et être un allié de taille, plutôt que d’ aggraver le problème en permettant voire cautionnant  des pratiques d’écoblanchiment », conclut Geneviève Paul, directrice générale du CQDE.

L’écoblanchiment financier nuisible pour les investisseurs et l’environnement

Ce rapport fait ressortir que ce phénomène d’écoblanchiment nuit non seulement aux investisseurs, qui sont induits en erreur dans leurs décisions, mais également à la protection de l’environnement, retardant l’allocation de capitaux vers des projets axés sur la transition et qui soient véritablement durables. 

L’écoblanchiment financier compromet également la confiance des citoyen⋅nes envers les initiatives écologiques des institutions financières. 70 % des investisseurs particuliers au Canada ne comprennent pas suffisamment ce qu’implique un investissement responsable. Pour y remédier, le CQDE préconise une meilleure sensibilisation du public aux enjeux de durabilité et des exigences de formation accrue pour les conseiller⋅es financier⋅es.

 « Il est souvent difficile pour les investisseurs⋅euses de s’y retrouver en matière d’investissement durable ou responsable. Comment s’assurer que ce dans quoi on investit aura vraiment les retombées désirées, et ne contribuera pas à aggraver la crise environnementale ? », questionne Me Julien Beaulieu, chercheur pour le CQDE et auteur principal du rapport.

Pour un cadre juridique à la hauteur des défis

Bien que les lois actuelles interdisent déjà de nombreuses formes d’écoblanchiment, elles présentent plusieurs limites. Par exemple, il n’existe présentement aucune loi  qui détermine les conditions minimales pour qu’un produit financier soit « vert » ou « durable». Dans son rapport, le CQDE recommande donc un meilleur encadrement réglementaire en matière de finance durable. 

Le CQDE a identifié 26 recommandations qui se résument en 6 catégories : 

  • Réglementer l’offre de produits et de services émergents, tels que les crédits de compensation carbone volontaires, les obligations vertes et les services de notation ESG
  • Renforcer les règles de divulgation des risques et impacts environnementaux dans le secteur financier
  • Renforcer les obligations professionnelles des intermédiaires financiers
  • Faciliter les recours juridiques à l’encontre des acteurs fautifs
  • Intensifier la surveillance des déclarations environnementales trompeuses
  • Informer et sensibiliser le public

« Ces recommandations ont toutes le même objectif : mettre fin au far-west actuel qui nuit autant aux investisseurs particuliers, aux compagnies vertueuses et au secteur financier en général, qu’aux objectifs climatiques et de protection de la biodiversité », précise Julien Beaulieu.

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