Bien que la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) vise la protection de l’environnement, elle n’interdit pas totalement les projets qui ont un impact néfaste sur l’environnement. Elle prévoit plutôt des mécanismes d’autorisation des activités en fonction de leurs impacts. La procédure d’évaluation et d’examen des impacts est l’un d’entre eux, réservé aux activités à risque élevé

À quoi sert une évaluation d’impacts environnementaux ?

L’évaluation d’impacts  permet au gouvernement du Québec d’évaluer un projet en analysant toutes ses retombées possibles dans l’optique de limiter ses répercussions environnementales. Elle permet aussi que la décision soit prise au niveau du gouvernement plutôt qu’uniquement par le ministère de l’Environnement.

Cette procédure a été conçue dans l’optique de tenir compte des préoccupations de divers acteurs concernés, tels que la société civile, les municipalités et les Peuples autochtones touchées par la réalisation du projet. De plus, la population peut participer à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts environnementaux grâce à la consultation publique

Ainsi,  cette procédure devrait mener le gouvernement à prendre une décision éclairée sur le sort d’un projet en toute connaissance de cause sur les effets de celui-ci.

Quels projets requièrent une évaluation des impacts environnementaux ?

L‘encadrement des projets par la LQE se fait  en fonction du risque environnemental qui y est associé, comme nous le décrivons dans cet autre article. La procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement est requise lorsqu’une activité est considérée comme étant à risque élevé pour l’environnement

Pour déterminer si l’activité en question est considérée à risque élevé pour l’environnement, il suffit de consulter la liste de projets qui figure à l’Annexe I du Règlement relatif à l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement de certains projets. On y retrouve toutes les conditions et les spécifications concernant les sphères d’activités qui comportent un risque élevé environnemental. Ainsi, un projet énuméré à la liste du Règlement sera automatiquement assujetti à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement.

À titre d’exemple, la construction ou l’élargissement d’une route d’une longueur minimale de 5 km détenant au moins 4 voies de circulation nécessitent une évaluation des impacts

Il est important de noter que d’autres projets, qui ne sont pas énumérés dans le Règlement, peuvent aussi être exceptionnellement assujettis à la procédure.  La Loi confère au gouvernement, sur recommandation du ministre de l’environnement, le pouvoir d’assujettir un projet à la procédure d’évaluation dans certaines circonstances, notamment lorsqu’il juge que les enjeux environnementaux ou climatiques sont majeurs, ou lorsque les préoccupations du public le justifient. Les pressions de la société civile peuvent donc influencer le déclenchement de cette procédure. 

L’initiateur du projet peut aussi demander lui-même au gouvernement que son projet soit soumis à cette procédure

Les étapes de la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement 

Le présent article aborde la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement au Québec méridional. La partie plus nordique du Québec, à partir du 55e parallèle, est régie par un régime distinct.

Étape 1. Dépôt de l’avis et directive du ministère

L’initiateur du projet doit d’abord aviser le ministère de l’Environnement qu’il souhaite réaliser un projet assujetti à la procédure, en informant du même coup la municipalité concernée. Pour ce faire, il doit remplir un formulaire qui fait notamment état de la localisation prévue, de l’échéancier d’exécution ainsi que des principaux enjeux appréhendés sur le milieu récepteur.  

Le ministère dispose alors de 15 jours depuis la date de la réception de l’avis pour fournir à l’initiateur du projet une directive fixant les différentes composantes que doit minimalement comprendre son étude d’impact. Celles-ci incluent par exemple une description du lieu où il entreprendra son projet, une analyse des répercussions potentielles du projet, et les solutions d’atténuation  des effets néfastes sur l’environnement qu’il envisage. Le ministère peut,  par ailleurs, imposer un certain délai à l’initiateur du projet quant à la réalisation de l’étude d’impact

Étape 2. Réalisation de l’étude d’impact par l’initiateur du projet

Une fois que le ministère a émis la directive,  l’initiateur du projet a l’obligation de publier un avis qui annonce le début de l’évaluation environnementale. La publication, qui se fait au Registre des évaluations environnementales, rend l’avis de projet accessible à tous·tes pour consultation publique. 

Cet avis mentionne que toute personne, tout groupe ou toute municipalité dispose de 30 jours pour communiquer ses observations sur les enjeux que l’évaluation d’impact devrait considérer. 

Une fois le délai de 30 jours de consultation écoulé, le ministère transmet à l’initiateur du projet tous les enjeux évoqués qu’il juge pertinent de prendre en considération dans son étude. Il publie au Registre les préoccupations soulevées. 

L’initiateur du projet réalise alors l’étude d’impact en tenant compte des enjeux soulevés et il la  remet au ministère, qui la publie au Registre. La population peut donc en prendre connaissance.

Étape 3. Analyse de l’étude d’impact par le ministère de l’environnement

La recevabilité de l’étude est ensuite évaluée par le ministère de l’Environnement. Lors de cette analyse consistant entre autres à vérifier le respect des exigences de la directive, le ministère peut arriver à trois conclusions différentes : 

  • Étude recevable : À la lumière des informations contenues dans l’étude d’impact,  s’il estime qu’elle est recevable, le ministère avise l’initiateur du projet par écrit afin que celui-ci puisse amorcer la période d’information publique.  Ce n’est pas l’aboutissement du processus mais plutôt un feu vert pour les prochaines étapes.
  • Étude incomplète : S’il est d’avis que l’étude ne répond pas de manière satisfaisante aux sujets ciblés par la directive ou ne tient pas suffisamment compte des enjeux soulevés lors de la consultation, le ministère peut faire part de ses commentaires ainsi que de ses constatations à l’initiateur du projet afin qu’il apporte les modifications nécessaires. Ce faisant, celui-ci devra joindre à son étude les compléments d’information requis  s’il veut  voir son projet se réaliser. Une fois que ces compléments sont fournis, le ministère juge de manière définitive de la recevabilité de l’étude d’impact (recevable ou irrecevable).
  • Étude irrecevable : S’il est d’avis que l’étude d’impact est non recevable malgré les compléments d’information fournis par l’initiateur du projet, le ministère se doit d’informer celui-ci en lui envoyant un avis. Cette décision du ministère met un terme au processus d’évaluation environnementale.

Étape 4. Participation de divers acteurs

Si l’étude d’impact est considérée recevable par le ministère, le reste de la procédure prend place, impliquant parallèlement un mécanisme d’information et de consultation du public ainsi qu’une analyse environnementale par le ministère.

Consultation du public et rôle du BAPE

Une fois que  l’étude d’impact est considérée recevable par le ministère, la période d’information publique peut débuter. Cette période dure 30 jours. Celle-ci doit être annoncée par l’initiateur du projet au moyen d’un avis dans un quotidien ou un hebdomadaire qui sera publié dans le secteur où le projet est enclin à naître. Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) en fait également l’annonce par un communiqué de presse. La population peut donc se tenir informée en surveillant la publication de l’avis. 

Au cours de cette période toute personne, municipalité ou organisation peut demander au ministère, par écrit, la tenue d’une séance de consultation publique dans l’optique de pouvoir partager ses consternations, souhaits et/ou suggestions relatives au projet plutôt que de seulement être informée. La consultation publique est abordée en profondeur dans cet article Obiterre. Retenons que toute demande sérieuse et justifiée ne peut être ignorée et doit être transmise au BAPE. 

Le BAPE analyse les demandes de consultation reçues et recommande au ministère le type de mandat que celui-ci devrait lui confier parmi les options d’une audience publique, d’une consultation ciblée ou d’une médiation.

La population ou des groupes particuliers sont alors invités à intervenir devant le BAPE pour présenter leurs observations ou leurs impressions sur le projet. 

Une fois son mandat réalisé, le BAPE est tenu de rédiger et de transmettre au ministère un rapport comportant ses constatations ainsi que ses diverses analyses. Le rapport du BAPE  doit être rendu public par le ministère dans les 15 jours de sa réception.

Pour en apprendre davantage sur le rôle et la mission du BAPE, vous pouvez consulter cet article Obiterre. 

Analyse environnementale du projet

Parallèlement à la consultation publique, le projet doit faire l’objet d’une analyse environnementale réalisée par les spécialistes du ministère de l’Environnement, qui forment un « Comité consultatif sur les évaluations environnementales stratégiques ». Cette évaluation consiste à analyser l’acceptabilité environnementale du projet, la pertinence de sa réalisation ainsi que ses conditions d’autorisation dans l’éventualité où l’exécution du projet serait accordée

Le ministère peut demander à l’initiateur du projet de fournir des renseignements supplémentaires ou d’effectuer des recherches supplémentaires.

Une fois l’analyse effectuée, le comité consultatif rédige un rapport qui est présenté au ministère. Celui-ci est ensuite rendu public dans un registre.

Une fois le rapport du BAPE et  l’analyse environnementale du comité consultatif du ministère complétés, le ministère  fait une  recommandation, favorable ou défavorable, au gouvernement

Étape 5. Décision du gouvernement

Il revient par la suite au gouvernement de prendre la décision finale quant à la réalisation du projet et de la transmettre à l’initiateur dans les meilleurs délais. Le gouvernement a un large pouvoir discrétionnaire politique qui fait en sorte qu’il n’est pas obligé de suivre la recommandation du ministère. Il peut fonder sa décision sur d’autres considérations, qu’elles soient politiques, sociales ou économiques. Toutefois, autoriser un projet qui soulève beaucoup de contestation au sein de la population et qui est même déconseillé par le ministre de l’Environnement peut être difficile à justifier politiquement pour le gouvernement.  

Ainsi, le gouvernement peut :

  • Autoriser le projet avec ou sans modifications, en imposant des conditions, restrictions et/ou interdictions qu’il fixe.
  • Refuser d’autoriser le projet

Étape 6. Processus de suivi et de contrôle

L’initiateur dont le projet a été autorisé a la responsabilité de s’assurer que le projet soit réalisé dans le respect des autorisations gouvernementales et ministérielles reçues. C’est à lui que revient donc la tâche de surveillance et de suivi continu. Il a également l’obligation d’analyser en temps réel les impacts ayant été prévus lors du processus d’évaluation et il se doit de juger de l’efficacité des mesures d’atténuation des impacts mises en place

Quant à lui, le ministère est tenu d’exercer un certain contrôle tout au long de la réalisation du projet, c’est-à-dire du début de la construction de celui-ci jusqu’à sa fermeture. Les citoyen·nes qui constatent qu’un projet ne semble pas conforme aux normes environnementales en vigueur ou aux conditions qui lui ont été imposées par le gouvernement ont accès à différentes mesures de suivi pour contacter le ministère, abordées dans cet article Obiterre. 

Pour connaître les conditions environnementales qui ont été imposées dans l’autorisation d’un projet, il peut être nécessaire de faire une demande d’accès à l’information.

Québec méridional et territoires nordiques : quelles différences pour la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement ?

Il existe deux régimes distincts prévus dans la Loi sur la qualité de l’environnement. L’un d’eux concerne les dispositions d’application générale au Québec tandis que l’autre s’applique uniquement à la région de la Baie James et du Nord québécois. 

Par conséquent, la Loi prévoit une procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement propre aux territoires nordiques. Les dispositions législatives propre à ces territoires  ont été pensées et adoptées en conformité avec ce qui est prévu dans la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ) ainsi que dans la Convention du Nord-Est québécois (CNEQ) de manière à respecter les ententes conclues avec les Nations autochtones présentes dans ces régions du Québec

Ainsi, la principale différence observable entre ces deux types de procédure d’évaluation environnementale est la considération et  la participation des Nations autochtones  (les Cris, les Naskapis et les Inuits) qui habitent ces territoires.


Attention:  Cet article présente le droit en vigueur au Québec et est fourni à titre informatif uniquement. Il ne constitue pas un avis juridique et ne devrait pas être interprété comme tel. Pour obtenir des conseils juridiques, vous pouvez consulter un·e avocat·e ou un·e notaire. Pour obtenir de l’information juridique, vous pouvez contacter les juristes du CQDE.  

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